Texte : Florence Vaudron

Texte :  Florence Vaudron

Avec un premier projet, “Montero”, dévoilé vendredi dernier et propulsé aussitôt en tête des charts, une collab avec Jean Paul Gaultier et plusieurs coups d’éclats mode qui n’ont pas manqué de déchainer les vieux fascistes du fond de la classe, Lil Nas X n’en finit pas de casser les codes de la masculinité et de nous démontrer que le superhéros de l’année, c’est lui.

Après avoir annoncé qu’il était littéralement “enceint” de son premier album le 2 septembre sur son compte Instagram, Nas a accouché de “Montero” vendredi dernier. Une renaissance en quelque sorte puisque c’est le nom que sa mère lui avait donné à sa naissance d’après Mitsubishi Montero, une voiture dont elle rêvait, mais qu’elle n’a jamais eu l’occasion de posséder. Émaillé de featuring high level comme Miley Cyrus, Elton John, Megan Thee Stallion, Doja Cat ou Jack Harlow, “Montero” est un véritable manifeste queer et autant un phénomène musical que sociétal. Depuis 3 ans, le rappeur de 22 ans s’adonne comme personne à déconstruire les codes de genres dans l’univers de la musique et de la mode.

2019, Lil Nas X était encore un ado fluet, qui, chapeau de cow-boy vissé sur la tête, foulait le gazon brûlé d’Atlanta et se retrouvait, par l’opération du Saint Esprit, à sortir le plus gros tube de la planète “Old Town Road”. Un premier single enregistré dans un vieux studio cheap et composé sur un beat acheté pour quelques centimes de dollars devenu littéralement un hymne planétaire, appelant à la défiance (“Can’t nobody tell me nothing”), et à la ténacité (“I’m gonna take my horse, To the old town road, I’m gonna ride ’til I can’t no more”). Monté en épingle via une campagne TikTok, “Old Town Road” avait fait râler les gardiens du temple hip hop pour mélanger des styles, a priori ennemis, la trap et la country. Dear Lord, ils n’étaient pas au bout de leurs surprises… Depuis, le titre est passé “Gold & Platinium » (d’or et de platines, mais pas version Jul hein), Nas a fait son coming-out (en juin 2019) et a été propulsé icône queer, notamment en multipliant les déclarations décomplexées sur sa sexualité gay. On se rappellera, entre autre, de ce tweet on fleek publié le 29 juin 2021 ou, sur son compte perso, Lil Nas X fait l’apologie du “Power Bottom” (comprenez le passif puissant, celui qui domine en étant pénétré, bref, vous l’avez) en reprenant les paroles de “Flawless” de Beyoncé :

“We teach our bottoms to shrink themselves, to make themselves smaller. We say to bottoms, you can have ambition, but not too much. You should aim to be successful, but not too successful. Otherwise, you would threaten the top.”

Comme le rappelait Libération la semaine dernière dans un édito signé Guillaume Lecaplai, “dans un monde où ‘enculé’ continue d’être jeté à tout bout de champ aux gens qu’on souhaite rabaisser, dire qu’on l’est, enculé, brise un sérieux tabou”. Si cette déclaration a déclenché les foudres chez les conservateurs et tous les machos de la communauté hip hop affolaient qu’on dynamite leurs pseudo codes de virilité, elle a surtout confirmé le statut de Lil Nas X comme superhéros de la nation queer.

L’influence de Lil Nas X va bien au-delà du monde de la musique, vous l’aurez compris, et le rappeur est en passe de chambouler l’industrie de la mode à la même vitesse. Alors qu’il maintenait déjà tout le monde en haleine en début de mois avec l’annonce de la sortie de son album “Montero”, Lil Nas X entretenait en parallèle le mystère sur un “big announcement” à venir bientôt… Après analyse de retweets et d’émojis parsemés ici et là, les fans du rappeur ont compris que celui-ci préparait une collaboration avec l’enfant terrible en chef de la mode : Jean Paul Gaultier. L’association de ces deux-là est apparue sous nos yeux comme une évidence, tant l’univers pop et queer du jeune rappeur entre en résonnance avec celui du couturier et tant l’un incarne tout ce que l’autre a toujours défendu. Lundi dernier, le duo a dévoilé le fruit de sa collaboration : un top à manches longues en tulle multicolore reprenant l’esthétique biblique arty chère à Lil Nas X où celui-ci est représenté tel un ange aux ailes déployées, entouré de petits diables. Ultime référence biblique, le modèle sera distribué à 666 exemplaires (le chiffre du diable, héhé), sera livré entre le 15 et 30 octobre prochain, et s’annonce déjà collector.

Cette collaboration de choc vient s’ajouter à une série de hold-up de red carpets dont le rappeur est à l’origine. Spécialiste des looks iconiques (on se rappelle de son full look cowboy rose Barbie aux Grammys 2020), Nas s’amuse toujours plus à redéfinir les normes du genres avec ses looks jusqu’à apparaître lors de la cérémonie des VMAS cette année dans une robe de custom couleur lila signée Atelier Versace. Narguant les photographes avec sa perruque de diva, Lil Nas X confirmait une fois de plus son statut d’icône et chef de file d’une génération de rappeurs LGBTQ+, comme la française Lala&Ce, influents dans la mode et déterminés à s’affranchir des codes.